Animal & Fiction

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Lés Animàus den lés cuntes en parlanjhe poitevin-saintongeais

Illustration 1 : fichier Demi-Jhàu.
Demi-JhàuAfficher la suite de la légende

Illustration 1 : fichier Demi-Jhàu.
Demi-Jhàu
Illustr. Fanny Coutin, 2005


Illustration 2 : Fichier Francille 1.  
La Ganipote dans Francille
Illustr. Boris Lambert, 2005

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Les Animaux dans les contes en langue poitevine-saintongeaise

Les animaux revêtent dans la tradition orale et écrite en poitevin-saintongeais de multiples formes, de la plus familière : animaux de la ferme, oiseaux…, à la plus étrange : bête à sept têtes, serpent-dragon, êtres hybrides, menaçants, malheureux, peuplant au quotidien les lieux dangereux d’où il faut éloigner les enfants ou surgissant dans les contes populaires, repris par les néoconteurs.

Langue et imaginaire : du Petit au Demi Jhàu (Coq)

Le « petit jhau » ou la « petite moetié de jhàu » (petit coq) du conte très répandu dans l'ouest (T715) apparait souvent, aussi, sous la forme d’un intrépide « demi-jhàu » (demi-coq), né d’un œuf coupé en deux. L’expression « petite moetié » a pu faciliter le glissement vers le « demi », porte ouverte vers de nouvelles significations (Voir le film d’animation Demi-Jhàu, Lucie Mousset, 2012).

Du Cri à la parole : les mimologismes

Aux animaux les plus proches la tradition orale prête volontiers des paroles mimant les sonorités de leur cri, paroles souvent moqueuses, drôles, prêtes à surgir au détour des histoires et des fables : « Coucou, t’és fou ! Tàe-tou ! » (Coucou/cocu, t’es fou ! Toi aussi !)

Dans Les Greneuilles thi demandant in roi, fable adaptée de La Fontaine par Edouard Lacuve (Jacquett) les grenouilles revendiquent : « Roi-roi- roi- roi- roi- roi !... Roi-roi- roi- roi- roi- roi !... Le ban Diu an avoit les oreilles cassaies… Le peuvait rein dormi… » (Roi-roi- roi- roi- roi- roi !... Roi-roi- roi- roi- roi- roi !... Le bon Dieu en avait les oreilles cassées… Il ne pouvait pas fermer l’œil.)

Et on raconte… L’ajhace é le coucou (Marcel Sicaud, dans Paroles du Mellois)

(Le coucou) L’arive au moes de mars… é pi l’ét la jhusque fin jhuin début jhullét…, pasque den lés prmàes daus tenps que l’étét la, l’avét étai enbauchai pr faere lés métives, le coucou… E pi l’ajhace qu’étét den in chagne a coutai, é pi qui disét, yéle : « Cha quatre ! cha quatre ! cha quatre ! » O felét que le coucou doune lés jhérbes cha quatre. Que le dissit, lés gas, vous m’avéz pris çhéte annàie, mé l’annàie prchéne, vous me revéréz pa ! En fét, dépeù, quant le vét que lés bllais quemençant a jhauni, le dit : « Pr pa que le m’enbauchant a faere lés métives i me fout le canp », ol ét pr ça qu’un dit « fégnant queme in coucou ».

(Le coucou) Il arrive au mois de mars… et il est là jusque fin juin début juillet..., parce que les premiers temps qu’il était là, il avait été embauché pour faire les moissons, le coucou… Et la pie, dans un chêne proche de là, disait : « Par quatre ! Par quatre ! Par quatre ! Par quatre ! ». Il fallait que le coucou donne les gerbes par quatre. Les gars, dit-il, vous m’avez attrapé cette année, mais l’année prochaine, vous ne me reverrez pas ! En fait depuis, quand il voit que les blés commencent à jaunir, il dit : « Pour éviter qu’ils m’embauchent pour les moissons, je m’en vais ». C’est pour ça qu’on dit « Paresseux comme un coucou ! »

De l’Animal... au diable

Les noms et représentations des animaux suggèrent souvent la proximité d’un univers inquiétant et portent la marque du Malin, comme le chevau dau diablle, mante religieuse ou libellule, dont le nom peut provenir des chevauchées nocturnes attribuées aux servantes des curés au XVIe siècle, le chevàu malét errant la nuit et que le voyageur doit éviter de monter sous peine de perdre la raison ou la poule négre, poule aux oeufs d'or, autre figure animale du diable...
Souvent victimes de maléfices, les humains peuvent aussi se transformer en bêtes, petite chatte blanche ou Bête monstrueuse des contes, jusqu’à ce qu’on les délivre du mauvais sort.

… et au bestiaire fantastique

Humains transformés en animaux (mouton, chèvre, chien, loup ou « bête » mal définie), les ganipotes, galipotes, beliches, loups-garous... errent la nuit, condamnés à attaquer les autres humains :

Le cheminét en subllotant den in chemin de travrse voure lés grands chagnes se rejhéndiant au-dessu de sa tàete, quoure l'entendit dare li a ine demi vrsane ine oalle çhi bequelét. (…) Tout d'in cop, la brghéte çhi le seguét tout cuntant, li sautit su lés épales, é le sentit qu'o le bijhét bénréde su le cagouét. (…) Francille, la felle dau sorçàe Bouinuchét étét galipote, é Norai venét de désaniàe ce que l’aemét le mae den çhau munde.

Il marchait en sifflotant dans un chemin de traverse où les grands chênes se rejoignaient au dessus de sa tête, quand il entendit derrière lui, à une faible distance, une brebis qui bêlait. (…) Soudain la brebis qui le suivait tout à l'heure, lui sauta sur les épaules et il sentit qu'elle l'embrassait fort sur la nuque. (…) Francille, la fille du sorcier Bouinuchet, était galipote ! Et Honoré venait de détruire ce qu’il aimait le plus au monde.
(Francille, 2005)

Héros de récits pathétiques, comme la légende de Francille, ou facétieux comme « La Beliche » (Contes de la pigouille), ces êtres hybrides, après avoir été signalés par les folkloris

Les animaux dans les contes en langue poitevine-saintongeaise

Les animaux revêtent dans la tradition orale et écrite en poitevin-saintongeais de multiples formes, de la plus familière : animaux de la ferme, oiseaux …, à la plus étrange : bête à sept têtes, serpent-dragon, êtres hybrides, menaçants, malheureux, peuplant au quotidien les lieux dangereux d’où il faut éloigner les enfants ou surgissant dans les contes populaires.

Aux animaux les plus proches des humains, la tradition orale prête volontiers des paroles mimant les sonorités de leur cri, paroles souvent moqueuses, drôles, prêtes à surgir au détour des histoires et des fables : « Coucou, t’és fou ! Tàe-tou ! » (Coucou/cocu, t’es fou ! Toi aussi !)

En voici quelques illustrations :

Dans Les Greneuilles thi demandant in roi, fable adaptée de La Fontaine, les grenouilles revendiquent : « Roi-roi- roi- roi- roi- roi !... Roi-roi- roi- roi- roi- roi !... Le ban Diu an avoit les oreilles cassaies… Le peuvait rein dormi… » (Roi-roi- roi- roi- roi- roi !... Roi-roi- roi- roi- roi- roi !... Le bon Dieu en avait les oreilles cassées… Il ne pouvait pas fermer l’œil.)

L’ajhace é le coucou

(Le coucou) L’arive au moes de mars… é pi l’ét la jhusque fin jhuin début jhullét…, pasque den lés prmàes daus tenps que l’étét la, l’avét étai enbauchai pr faere lés métives, le coucou… E pi l’ajhace qu’étét den in chagne a coutai, é pi qui disét, yéle : « Cha quatre ! cha quatre ! cha quatre ! » O felét que le coucou doune lés jhérbes cha quatre. Que le dissit, lés gas, vous m’avéz pris çhéte annàie, mé l’annàie prchéne, vous me revéréz pa ! En fét, dépeù, quant le vét que lés bllais quemençant a jhauni, le dit : « Pr pa que le m’enbauchant a faere lés métives i me fout le canp », ol ét pr ça qu’un dit « fégnant queme in coucou ».

(Le coucou) Il arrive au mois de mars… et il est là jusque fin juin début juillet…, parce que les premiers temps qu’il était là, il avait été embauché pur faire les moissons, le coucou… Et la pie, dans un chêne proche de là, disait : « Par quatre ! Par quatre ! Par quatre ! Par quatre ! ». Il fallait que le coucou donne les gerbes par quatre. Les gars, dit-il, vous m’avez attrapé cette année, mais l’année prochaine, vous ne me reverrez pas ! En fait depuis, quand il voit que les blés commencent à jaunir, il dit : « Pour éviter qu’ils m’embauchent pour les moissons, je m’en vais ». C’est pour ça qu’on dit « Paresseux comme un coucou ! »

Liliane Jagueneau

Bibliographie :

Barillot (Maryvonne), Contes et récits du Pays Mellois, Mougon, Geste éditions, 1994
Bonneau (Daniel), Jhituns, Arantèle, Geste éditions, 1994
Coupaye (Marie-Hélène), Contes et Légendes entre Anjou et Poitou, Mougon, Geste éditions, 2003
Demi-Jhàu/Moitié de Coq - Lés Troes Petites Poulétes, Mougon, Parlanjhe Vivant-Geste éditions, 2005 (album-CD illustré par Fanny Coutin)
Dubois (Ulysse), Duguet (Jacques), Migaud (Jean-François), Renaud (Michel), Glossaire des parlers populaires : de Poitou, Aunis, Saintonge, Angoumois, SEFCO, 1992-1994
Fables en patois poitevin la plupart imitées de La Fontaine par Jacquett (Edouard Lacuve, imprimeur à Melle (Deux-Sèvres), 1893, rééd. Geste éditions, 1999 (avec traduction)
Francille, d’après Henri Martin, Mougon, Parlanjhe Vivant-Geste éditions, 2005 (album-CD illustré par Boris Lambert)
Jônain (Pierre), Dictionnaire du patois saintongeais, Royan, Niort (Clouzot) et Paris (Maisonneuve et Cie), 1869
Le Quellec (Jean-Loïc), « La Mythologie des libellules », dans Martinia, sept. 1990
Le Quellec (Jean-Loïc), Alcool de Singe et liqueur de vipère, Mougon, Geste éditions, 1991
Le Quellec (Jean-Loïc), Petit dictionnaire de zoologie mythique, éd. Entente, 1996
Mineau (Robert), Racinoux (Lucien), La Vienne légendaire et mythologique, Brissaud, 1995
Mousset (Lucie), Demi-Jhàu, 2012 (film d’animation, à paraitre en DVD).
Mousset (Lucie), Lés troes petites poulétes, Parlanjhe Vivant (film d’animation/DVD sous-titré par Audrey Nicolas).
Nowak (Éric), Légendes et comptines d’animaux en Nord-Gironde et dans les deux Charentes, Mougon, Geste éditions, 1996
Nowak (Eric), Légendes fantastiques charentaises et gabayes, Mougon, Geste éditions, 1999
Nowak (Éric), Légendes fantastiques de Berry, Touraine et Sologne, Mougon, Geste éditions, 1999
Nowak (Éric), Légendes fantastiques de la Vienne, Mougon, Geste éditions, 2007
Nowak (Éric), Les Contes traditionnels du Poitou, éditions CPE, 2011
Pacher (Maurice), Pouilloux (Thierry), Fantastiques Deux-Sèvres, Conseil général des Deux-Sèvres, Geste éditions, 2003
Paroles du Mellois. Contes, chansons, musiques, virelangues, formulettes et témoignages, UPCP-Métive et Geste éditions (CD,