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Le Phénix

Le phénix dans une œuvre d'Etienne Binet
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Le phénix dans une œuvre d'Etienne Binet
Essay des merveilles de nature, et des plus nobles artifices… / Etienne Binet. - Paris : Henry Le Gras, 1657 (Poitiers, Bibliothèque universitaire, Fonds ancien, 43181)

Ouvrage publié par le jésuite Étienne Binet (sous le pseudonyme de René François) dans le but de donner des connaissances précises aux jeunes prédicateurs pour bâtir leurs sermons. Réédité à de nombreuses reprises, il fut l'une des œuvres scientifiques les plus populaires du XVIIe siècle et renforça sérieusement la croyance en l’existence du phénix, entre autres, bien qu'il fût essentiellement fondé, comme de nombreux ouvrages de l'époque, sur les propos des Anciens, et non directement sur l'observation de la nature.


La constellation du phénix
L’usage des globes céleste et terrestre, et des sphères suivant les différents systêmes du monde… / Nicolas Bion. - Paris : Jacques Guérin et Nyon, 1751 (Poitiers, Bibliothèque universitaire, Fonds ancien, 58175)
Le phénix ayant fasciné les scientifiques, il a donné son nom, en astronomie, à une « constellation méridionale, située entre l'éridan et le poisson austral ».


Phénix sur les stalles de la cathédrale Saint-Pierre de Poitiers, XIIIe siècle


Enseigne au phénix de la rue Rabelais à Poitiers


Constellation du phénix
Recueil de planches de l’Encyclopédie par ordre de matières. Tome septième. – Paris : Panckoucke ; Liège : Plomteux, 1789 (Poitiers, Bibliothèque universitaire, Fonds ancien, m 205442-07)


Hieroglyphica… / Pierio Valeriano. – Lyon : Frellon, 1610 (Poitiers, Bibliothèque universitaire, Fonds ancien, RA9)
Les Hieroglyphica, parus pour la première fois en 1556, connurent un grand succès jusqu’au milieu du XVIIe siècle. Ils sont divisés en 58 livres qui couvrent tous les domaines du savoir qui peuvent fournir des objets d’interprétation symbolique. Pierio Valeriano dit partir des hiéroglyphes d’Aorapollon, mais puise également à d’autres sources, qu’il ne nomme pas toujours.


Marque au phénix de Giovanni Padovano et Venturino Ruffinelli
Dicta notabilia... – Venise : Giovanni Padovano et Venturino Ruffinelli, 1534 (Poitiers, Bibliothèque universitaire, Fonds ancien, XVI 195-02)


Oratorio de i religiosi, et esercitio de i virtuosi… / Antonio di Guevara. – Venise : Gabriel Giolito de Ferrari, 1560 (Poitiers, Bibliothèque universitaire, Fonds ancien, XVI 883)
Marque d'imprimeur libraire de Gabriel Giolito de Ferrari et fratelli, représentant, au-dessus d'une urne, un phénix renaissant de ses cendres et absorbant les rayons du soleil.


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Le phénix est un oiseau fabuleux d'une extraordinaire longévité. Selon le mythe le plus répandu, dans l'impossibilité de se reproduire car unique de son espèce, il a le pouvoir de renaître de ses cendres après s'être consumé sur un bûcher. Le phénix est de ce fait devenu un symbole universel de résurgence cyclique ou de résurrection.

Venant probablement d'Orient, sa légende se retrouve en Égypte ancienne, avec l'oiseau bennou. Dans l'antiquité gréco-romaine, évoqué par Ovide ou Pline, le phénix incarne l'immortalité, le retour de l'âge d'or ainsi que la piété filiale et la légitimité de la succession dynastique. Son image est reprise par le symbolisme religieux chrétien comme exemple de la possibilité de la résurrection des corps, puis par assimilation, comme figure du Christ et allégorie de la survie de l'âme.

À l'époque moderne, les positions face aux mythologies antiques sont contrastées. Certains assimilent la fable antique à une forme de tromperie, dessinant l’espace imaginaire sans apporter de connaissances réelles. D'autres transforment le retour à la fable en une quête de richesse morale, une aspiration à une simplicité de vie ; de nouvelles perspectives s'ouvrent pour l’usage et l’interprétation du mythe, qui est réhabilité en tant qu’élément de culture. Aussi, malgré l'apparition progressive de l'esprit critique et l’émergence de nouvelles disciplines comme la zoologie, de nombreuses références à des animaux imaginaires, tel le phénix, demeurent.

Dans le clergé chrétien, si certains comme Patrick Young se posent sérieusement la question de l'existence du phénix, son image surtout est abondamment utilisée afin de faire admettre et comprendre la résurrection de la chair. Le phénix permet à l’imagerie de la Contre-Réforme de célébrer ses meilleurs représentants, tel Ignace de Loyola. Puis, les prédicateurs du XVIIe siècle l'associent à la devise « ut vivat », qui souligne la volonté de gloire immortelle et la foi héroïque, ou le mettent en relation avec le sujet de Marie-Madeleine, afin de symboliser l'âme pécheresse. C'est le cas de Pierre de Bérulle, qui fait par ailleurs du phénix « le plus parfait modèle du chrétien ». Malgré le développement progressif de l'esprit critique, la valeur d'un animal étant plus liée à sa capacité d’enseigner la religion qu’à sa véracité, tout animal riche de signification symbolique reste en faveur : ainsi, afin de faciliter la prédication, Étienne Binet résume toutes les connaissances relatives au phénix.

Au XVIe siècle, le phénix est également très présent chez les scientifiques, qui n'osent pas encore remettre en cause les écrits des Anciens, s'efforçant de retrouver dans la nature ce qui est dans les livres et non l'inverse, avec pour conséquence la prévalence de propos erronés et contradictoires. Ainsi Pierre Belon et Ulisse Aldrovandi admettent-ils l'existence du phénix, mais, si le premier croit retrouver le phénix dans l’Apus et en fait un paradisier, le second l'en distingue. De même Ambroise Paré put contempler un des vrais phénix qui étaient supposés circuler. Le phénix restera aussi présent jusqu'au XVIIIe siècle chez la plupart des clercs naturalistes, qui croient en une nature, et par derrière elle en un Dieu, créant des animaux fantastiques et des monstres.

Après 1730, l'esprit critique devient la norme et les histoires fabuleuses disparaissent des ouvrages religieux et scientifiques, mais l'image du phénix reste populaire en particulier dans la littérature.

Le phénix est un oiseau fabuleux qui a la particularité de vivre très longtemps. Selon le mythe le plus répandu, il ne peut se reproduire car il est l’unique représentant de son espèce. Il a le pouvoir de renaître de ses cendres après s'être consumé sur un bûcher. Le phénix est de ce fait devenu un symbole universel de renaissance cyclique ou de résurrection.

Sa légende vient probablement d'Orient et existe déjà à la période antique. Le phénix incarne l'immortalité, la survie de l’âme et des valeurs liées à la famille.

Au cours de l’Histoire, la mythologie liée au phénix évolue. Cependant, on retient partout et de tout temps de cette légende l’incarnation du phénix immortel, symbole de résurrection, de renaissance. L'image du phénix reste populaire en particulier dans l’imaginaire de la littérature.

Aurélie Mattelon

Bibliographie :

Sources
 
Aldrovandi (Ulisse), Ornithologiae hoc est de avibus historiae Libri XII, Bologne, ex camerali typographia Manolessiana, 1645- 1681, 3 t.
 
Belon (Pierre), L’histoire de la nature des oyseaux, Genève, Droz, 1997
 
Bérulle (Pierre de), Œuvres complètes, Montsoult, Maison d'institution de l'Oratoire, 1960
 
Binet (Étienne) (sous le pseudonyme de René François), Essay des merveilles de nature et des plus nobles artifices. Pièce très necessaire, à tous ceux qui font profession d'éloquence, Paris, Henri Le Gras, 1657
 
Ovide, Métamorphoses, Paris, Gallimard, 2003
 
Paré (Ambroise), Des monstres et prodiges, Paris, Genève, Slatkine, 1996
 
Pline l’ancien, Histoire Naturelle, Livre X, Paris; Les Belles Lettres, 1961
 
Valeriano (Pierio), Hieroglyphica, Lyon, Frellon, 1610
 
Young (Patrick), Clementis ad Corinthios Epistola prior. Ex laceris reliquiis vetustissimi Exemplaris Bibliothecae regiae, eruit, lacunas explevit, Latinè vertit et notis brevioribus illustravit, Oxford, John Lichfield, 1633
 
 Études
 
Baratay (Éric), « Zoologie et Église catholique dans la France du XVIIIe siècle (1640-1840) : une science au service de Dieu », dans Revue d'Histoire des Sciences, 1995, 48, n°3, p. 241-265

Broek (Roelof van den), The Myth of the phoenix : according to classical and early Christian traditions, Leyde, Brill, 1972

Delaunay (Paul), La Zoologie au seizième siècle, Paris, Hermann, 1997

Fabrizio-Costa (Silvia), Phénix : mythe(s) et signe(s) : actes du colloque international de Caen (12 - 14 octobre 2000), Bern, Berlin, Bruxelles, Peter Lang, 2001

Ferrari (Anne), Figures de la contemplation : la « rhétorique divine » de Pierre de Bérulle, Paris, Cerf, 1997