Le frontispice des Mythographi latini de Th. Müncker
Mythographi latini… / Thomas Müncker. - Amsterdam : Veuve de J... Afficher la suite de la légende
Le frontispice des Mythographi latini de Th. Müncker
Mythographi latini… / Thomas Müncker. - Amsterdam : Veuve de Joannes Van Someren, 1681 (Poitiers, Bibliothèque universitaire, Fonds ancien, 70365-02)
Thomas Müncker propose une édition critique de plusieurs textes antiques d’Hygin, Lactance, Fulgence le mythographe. Le frontispice évoque de nombreux mythes antiques, parmi lesquels, au premier plan, Caron et son chien Cerbère aux multiples têtes.
Marque au cheval marin de Balthazar Arnoullet
Imperatorum & Caesarum vitae… / Johann Huttich. - Lyon : Balthazar Arnoullet, 1554 (Poitiers, Bibliothèque universitaire, Fonds ancien, FAP 4629)
Marque d’Huges de la Porte (Samson) et d’Antoine Vincent (Python)
Infortiatum Pandectarum juris civilis tomus secondus... - Lyon : Hugues De La Porte et Antoine Vincent, 1558 (Poitiers, Bibliothèque universitaire, Fonds ancien, XVI 226-02)
Si les descendants du libraire lyonnais Simon Vincent usent quelquefois d'une de ses marques, la Sainte Face, ils emploient également un ouroboros, du grec oura, « queue », et boros, « dévorant », « qui dévore ».
On lit dans les Hieroglyphica d'Horapollon, écrits au Ve siècle : « s'ils (les Égyptiens) veulent figurer l'éternité..., ils dessinent un serpent dont la queue est cachée par le reste du corps ». L’une des marques utilisées par Antoine Vincent montre le reptile, se mordant la queue, formant un cercle autour d'une main sortie des nuages. Dans cette main, un sceptre surmonté d'un œil rayonnant, signe solaire et attribut d'Apollon. Deux rameaux, généralement décrits comme du laurier et de l'olivier, forment comme deux crosses. Les couronnes de ces végétaux servaient à récompenser les vainqueurs et le laurier (daphné en grec, du nom de la nymphe dont il était épris) était la plante sacrée d'Apollon. A gauche, la devise « Vincenti », qui peut signifier « à Vincent » comme « au vainqueur ».
Cette marque est la réduction d'une autre, où l'on voit le dieu sur la dépouille du monstre Python (parfois il pose aussi le pied sur une lyre). Elle fut employée seule ou dans une composition illustrant l'association d'Antoine Vincent avec Hugues de la Porte (1500-1572). Celui-ci, jouant avec son nom, fait des portes de Gaza, arrachées par Samson, passant sous un portique, le symbole de la liberté (« libertatem meum mecum porto » : « je porte ma liberté avec moi »). Dans la marque reproduite, le dieu tient l'ouroboros d'une main, le sceptre de l'autre et Python (du verbe grec signifiant « faire pourrir », sort qui lui fut réservé) est figuré sous les traits d'un dragon, percé d'une flèche. La confusion entre serpents et dragons n'était pas rare ; les Latins employaient serpens, anguis et draco pour désigner l'un ou l'autre.
Éternité de cette victoire, d'Apollon contre Python, du Bien contre le Mal, éternité de l'art ? Haute idée qu'a l'imprimeur-libraire de sa fonction, de sa mission, le savoir éclairant le monde et confiance dans ses propres capacités ?
Marque des deux frères imprimeurs Dorico
Paraphrasis super libros de Republica Platonis… / Averroès. – Rome : Valerio et Luigi Dorico, 1539 (Poitiers, Bibliothèque universitaire, Fonds ancien, XVI 402)
La marque porte un cheval ailé qui gravit une cote fort escarpée. La devise « Nulla est via invia virtuti » (« Aucune voie n’est impraticable pour la vertu ») est ici illustrée de manière saisissante : la vertu, le cheval ailé, est sur le point d’arriver au sommet, malgré les difficultés.
Marque typographique de Charles Perier
L’Art vétérinaire…/ Jean Massé. - Paris, Charles Perier, 1563 (Poitiers, Bibliothèque universitaire, Fonds ancien, XVI 872)
La marque reprend le motif choisi pour son enseigne par Charles Perier. Bellérophon était un grand pourfendeur de monstres, parmi lesquels la Chimère, créature à la tête de lion, au corps de chèvre et à la queue de dragon. L’imprimeur-libraire s’identifie au personnage mythologique : calviniste convaincu, ce qui lui valut quelques peines d’emprisonnement (il importait des livres de Genève), il lutte contre les erreurs de la Tradition catholique, représentées par la chimère.
Marque au cerbère de Girolamo Polo.
Decisiones rotae Avenionis… / Hieronymus à Laurentiis. – Venise : Girolamo Polo, 1591 (Poitiers, Bibliothèque universitaire, Fonds ancien, XVI 979/01)
La devise est « Vis vincitur virtute » (qui peut se traduire par « La force peut être vaincue par le courage »).
Cerbère, le terrible chien à plusieurs têtes qui garde l’Enfer, est ici représenté en train de manger ; une main, symbole de la vertu, probablement celle de l’imprimeur-libraire Polo Girolamo, envoie de quoi nourrir la troisième tête, qui sera ainsi distraite comme les deux premières, déjà occupées. Aussi l’attention de la bête est-elle détournée et est-il possible de
Pour se faire connaître et marquer leurs œuvres de leur empreinte, tout en disant quelque chose d’eux-mêmes et de leur travail, les libraires avaient plusieurs moyens à leur disposition : la devise, l’enseigne et la marque.
Marque, devise, et enseigne : des relations complexes
La devise, une citation biblique, un emprunt à un auteur de l’Antiquité ou à une œuvre plus contemporaine, était le plus souvent en latin. Bien qu’elle soit toujours courte, il est souvent difficile d’en saisir le sens, tant le petit nombre de termes polysémiques employés permet d’hypothèses. Elle devait charmer le lecteur et montrer la qualité de l’imprimeur ou du libraire, chargé de diffuser le savoir.
L’imprimeur utilisait aussi l’enseigne, cette image placée le plus souvent au dessus de la porte de l’atelier, qui était signalée dans l’adresse, sur la page de titre, ou au colophon, à la fin du texte.
Les marques portaient souvent des personnages religieux, Christ, Vierge ou saints. Les animaux, comme les végétaux, étaient également très utilisés pour accompagner le motif principal ou être la figure centrale ; il pouvait s’agir non seulement de bêtes de la vie quotidienne, comme le chat ou la poule, de créatures plus exotiques, comme l’éléphant, mais aussi d’animaux que nous qualifions aujourd’hui d’imaginaires, tels que la licorne ou Cerbère.
Devise, enseigne et marque entretenaient des relations plus ou moins fortes, la signification de l’une pouvant enrichir ou tout au contraire, du moins à la première lecture, contredire l’autre. De manière plus ou moins claire y apparaissait le message que l’imprimeur-libraire voulait transmettre : sa soif de réussite, sa foi de réformé ou ses idéaux humanistes, son engagement politique ou sa fidélité au Roi.
La Symbolique animale : un riche héritage
La Bible pouvait être utilisée directement, comme matière première, ou à travers la lecture faite par d’autres auteurs ou textes, comme les bestiaires. Les imprimeurs et les libraires puisaient également dans le répertoire héraldique, qui influença le style des premières marques et leur symbolique, comme le montre l’exemple de la licorne. Ils allèrent également chercher des références dans les textes des auteurs latins comme grecs. Ils trouvèrent dans la mythologie antique des êtres particuliers, l’hydre de Lerne par exemple, dont la Renaissance avait enrichi la symbolique, bien souvent dans une perspective chrétienne. C’est ce que relèvent par exemple Alciat, dans ses Emblèmes, et Cesare Ripa dans son Iconologie.
Tous les animaux étaient porteurs de nombreux symboles, qui entraient parfois en contradiction les uns avec les autres. Certaines bêtes étaient même ambivalentes, ce qui enrichissait la symbolique et empêchait toute lecture univoque.
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Menato (Marco), Sandal (Ennio), Zappella (Giuseppina) (dir.), Dizionario dei tipografi e degli editori italiani : il Cinquecento, Volume I, A-F. Milan, Editrice Bibliografica, 1997
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